Je t’ai vu au fond de la salle. Tu t’es approché, prudemment, comme un chasseur auprès de sa proie. Par ton regard, j’ai compris. J’ai détourné le mien, en direction du prochain. À ma droite; un nouveau profil. Si j’avais pris le temps de lui parler, j’aurais su qu’il voulait possiblement m’inviter à dîner. Incapable de faire marche arrière, j’étais prisonnière d’une autre étreinte. Celle-ci, quoique ferme et douce à la fois, ne me rassurait pas suffisamment. J’ai tenté de me laisser aller, mais je craignais d’y laisser ma dignité.
Comme tout le monde, j’ai vu ces nombreux films et leur famille parfaite; deux enfants, la maison de banlieue, le chien, le VUS et le chalet. Puis, il y a moi au centre de tous ces idéaux. Moi, planquée au milieu de la piste de danse, qui se demande si le grand A est essentiel à ma vie. Tant qu’à avoir un B, vaut mieux être seule que mal accompagnée.
Notre génération est plutôt du type S : satisfaction soudaine simplement en swipant. On glisse d’un bord pis de l’autre et on enchaîne les pas sur une mélodie déjà fredonnée des dizaines de fois. À l’ère de la Tinder game, en deux-trois mouvements de doigts, on souhaite trouver notre refrain préféré. Too bad, le DJ en a abusé pis mon petit cœur est usé. À quoi bon danser un slow quand on peut danser en solo?
J’ai appris à être seule, mais aussi à composer avec toutes les chansons. Jusqu’à la prochaine balade des gens heureux, jusqu’à la prochaine balade des amoureux.
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